Contexte

Avant la mécanisation, la distance entre les rangs était déterminée par l'espace nécessaire aux animaux de trait pour tirer l’équipement dans le champ. Quand les tracteurs ont commencé à remplacer les chevaux, les chercheurs ont exploré l’idée des rangs plus étroits. Dans les années 1990, la recherche a montré qu'il était possible d'augmenter le rendement de près de 8 % en diminuant l’espacement entre les rangs de maïs de 102 à 76 cm (40 à 30 po)1. Depuis, des décennies de travaux ont montré que la géographie et les produits de maïs peuvent avoir un effet sur le rendement du maïs cultivé en rangs plus étroits que 76 cm (30 po).

Composantes du rendement

Pour un même taux de semis, la culture en rangs étroits permet de répartir les plants plus uniformément sur chaque rang. Théoriquement, accorder plus d’espace à chaque plant réduit la concurrence pour l'eau, les nutriments et la lumière2. Le potentiel de rendement du maïs cultivé en rangs étroits s’est révélé supérieur dans des milieux limitant substantiellement le rendement. Bien qu’un couvert végétal complet réduise l'évaporation de l'humidité du sol, la transpiration augmente quand une plus grande surface foliaire est exposée au soleil (en raison d’une répartition plus uniforme des plants). Les plants de maïs adaptent la taille des épis et leur nombre en fonction de la densité de peuplement et de l’espace disponible.

Considérations relatives à l’équipement

Le compactage est une préoccupation dans un contexte de diminution de l'espacement des rangs. Réduire le plus possible la circulation peut faire une différence dans les comparaisons de rendement entre la culture en rangs étroits et en rangs plus larges. Le fait de rouler sur les rangs semés et de créer du compactage à long terme peut entraîner la perte des gains de rendement potentiels liés au passage à la culture en rangs plus étroits3.

Le coût des équipements ne peut pas être écarté lorsque l'on calcule le rendement économique du passage d'un espacement plus large à un espacement plus étroit. Aux États-Unis, on estime qu’un avantage de rendement de 6 à 8 % sur une période de 7 à 10 ans est nécessaire sur de grandes superficies (plus de 202 hectares ou 500 acres) pour récupérer les coûts du changement d'équipement4. Les régions du Nord de la « Ceinture de maïs » (Corn Belt) sont susceptibles de connaître une augmentation de rendement constante au fil des ans avec la production en rangs plus étroits2,3,5. Considérations supplémentaires relatives à l'équipement :

  • Semis. L'équipement utilisé pour deux cultures (soya et maïs) a été un facteur de motivation pour de nombreux producteurs qui ont adopté la culture du maïs en rangs étroits. Le besoin d'un nouvel équipement pour produire en rangs étroits l'une ou l'autre de ces cultures réduirait ou annulerait la nécessité d'augmenter le rendement pour rentabiliser l'investissement.
  • Désherbage. Les outils seront probablement limités à un espacement des rangs de 76 cm (30 po). Le maïs se remet mal des dommages causés par les pneus, et des pneus étroits sont nécessaires sur les équipements servant à épandre les pesticides et les engrais.
  • Récolte. Il faudra peut-être remplacer les têtes à maïs par des éléments plus lourds pour leur taille. On rapporte que la récolte est plus difficile dans les champs cultivés en rangs étroits. Avantage inattendu : les dégâts causés par les cerfs pourraient se limiter au périmètre des champs.
  • Configuration en rangs jumelés. Dans les champs où la population est de 86 111 plants/hectare (34 848 plants/acre), les plants peuvent être plus espacés lorsqu'ils sont semés selon une « configuration en losange ». Quand les plants sont espacés de 15 cm (6 po) sur des rangs de 76 cm (30 po), chacun se trouve à 24 cm (9,6 po) de son voisin le plus proche sur un rang jumelé de 19 cm (7,5 po) (figure 1)5. Il n’est pas nécessaire de changer la tête à maïs puisque les deux rangs jumelés sont réunis dans la même unité de rang au moment de la récolte.
On pense que la disposition en « losange » des plants dans un contexte de semis en rangs jumelés permet d'obtenir plus d’espace entre les plants sans changer la tête à maïs.
Figure 1. On pense que la disposition en « losange » des plants dans un contexte de semis en rangs jumelés permet d'obtenir plus d’espace entre les plants sans changer la tête à maïs.

Gestion des semis

Population et peuplement. Des études ont montré qu'il est possible d'augmenter la densité du peuplement avec ou sans diminution de l'espacement des rangs. Augmenter la densité de peuplement pour aider à réduire la concurrence des mauvaises herbes après la fermeture précoce des rangs peut souvent contribuer à augmenter le potentiel de rendement5. Les densités de peuplement optimales d’un point de vue économique sont semblables d’un espacement à l’autre2,6.

Sélection des produits de maïs. Les produits de maïs plus courts et plus hâtifs qui produisent moins de feuilles ou des feuilles plus étroites devraient réagir positivement à une combinaison de culture en rangs étroits et de densité de peuplement plus élevée2,3. Ainsi, les chercheurs du Nord de la « Ceinture de maïs » obtiennent une réponse de rendement positive de la part du maïs cultivé en rangs étroits lors des saisons de croissance plus courtes. Les produits de maïs plus grands, à maturation plus tardive et présentant une plus grande surface foliaire pourraient mieux convenir à un espacement plus large entre les rangs5. Une augmentation du rendement en matière sèche fourragère de 4 à 7 % a également été observée avec les produits d’ensilage de maïs cultivés en rangs de 51 cm (20 po) par rapport à ceux semés en rangs de 76 cm (30 po)7. Une augmentation différente a été obtenue selon la maturité relative du produit d'ensilage.

Pour certains producteurs agricoles, la rupture des tiges, ou tenue, est une préoccupation quand la densité de peuplement augmente; cependant, les produits de maïs peuvent être sélectionnés pour la tenue en fin de saison et la solidité des tiges, ce qui permet d’apaiser ces inquiétudes. En général, les nouveaux produits de maïs peuvent s’adapter à une densité de semis plus élevée. Des chercheurs du Michigan ont constaté un avantage de rendement plus constant de 2 à 4 % en passant d’un espacement de 76 cm (30 po) à 56 cm (22 po) et à 38 cm (15 po), respectivement (tableau 1)8. Ces travaux sont de nature à donner confiance aux producteurs canadiens de maïs et de soya qui envisagent un changement d’équipement pour passer à la culture en rangs étroits. Dans l'étude du Michigan, certaines différences ont été notées par rapport au sol, la culture en rangs étroits ayant générée une réponse de rendement plus positive dans les sols grossiers9.

Tableau 1. Effet de l’espacement des rangs sur le rendement en grain dans le Michigan.
Espacement des rangs Rendement en grain
76 cm (30 po) 165 boisseaux/acre
56 cm (22 po) 169 boisseaux/acre
38 cm (15 po) 172 boisseaux/acre
Source : Widdicome, W.D. and Thelen, K.D. 2002. Row widths and plant density effects on corn grain production in the Northern Corn Belt. Agronomy Journal. 94:1020-1023.

Conclusion

Les augmentations de rendement potentielles associées à la culture en rangs étroits sont plus importantes et plus constantes dans le Nord de la « Ceinture de maïs ». Au Canada, les producteurs agricoles passent parfois aux rangs de 51 cm (20 po) par préférence pour un outil de semis en particulier. Le choix des produits de maïs et celui de la densité de peuplement optimale sont des décisions très importantes, quel que soit l'espacement des rangs. D'autres facteurs à prendre en considération avant d’adopter la culture en rangs étroits sont le regroupement des équipements, le coût associé à l’achat ou à la modification d’un équipement et les changements à apporter aux pratiques de gestion.