Deux altises s’attaquent au canola, au colza et à la moutarde : l’altise des crucifères et l’altise du navet (figure 1). Ces deux insectes nuisibles de l’Eurasie ont été introduits en Amérique du Nord il y a de nombreuses années. À l’heure actuelle, les deux espèces sont présentes partout aux États-Unis et au Canada. Elles sont une biologie assez similaire et causent des dommages similaires. Les adultes mesurent environ 2 mm. Lorsqu’ils sont dérangés, ils sautent grâce à leurs pattes postérieures très développées.

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Figure 1. De gauche à droite : l’altise des crucifères, l’altise des navets, les deux espèces côte à côte. Photographies fournies gracieusement par Patrick Beauzay, North Dakota State University.

Biologie

Les adultes passent l’hiver dans la litière de feuilles mortes ou dans le chaume de graminées à proximité des champs où il y avait des plantes hôtes. Ils deviennent actifs lorsque la température atteint 14°C. Ils sortent de leur diapause sur une période de trois semaines. L’altise du navet débute ses activités un peu avant l’altise des crucifères. À la reprise de leurs activités, les adultes se nourrissent de resemis spontanés et de mauvaises herbes hôtes (barbarée vulgaire). Dès que le canola lève, ils se déplacent dans les champs de ces plantes hôtes. Leur vol est favorisé par du temps doux, sec et calme alors que par temps froid et pluvieux, ils ont davantage tendance à se déplacer en marchant ou en sautant. Les conditions excessivement chaudes et sèches ralentissent la croissance du canola et favorisent les envolées et l’activité des altises, provoquant ainsi des infestations partout dans le champ. Par temps froid et pluvieux, les altises tendent à se nourrir dans des zones plus concentrées en bordure du champ, près d’où elles ont passé l’hiver. Les adultes sont actifs pendant tout le mois de juin et commenceront à mourir vers fin juin ou le début de juillet. En juin, les femelles pondent des œufs dans le sol, près de plantes hôtes. Environ deux semaines plus tard, les œufs éclosent, puis les larves se nourrissent des racines des plantes hôtes. Elles passent par trois stades larvaires en environ un mois avant la pupaison, qui dure environ une semaine. De la fin juillet à la fin août, une génération d’adultes émerge du sol.

Cette génération d’été se nourrit de l’épiderme des feuilles et des siliques des plantes hôtes. Les regroupements d’adultes qui se nourrissent sur une seule plante sont communs (figure 2). Les adultes se déplacent ensuite vers leur site de diapause au début de l’automne.

d’altises des crucifères adultes nourrissent de siliques de canola.

Figure 2. Regroupement d’altises des crucifères adultes de la génération d’été qui se nourrissent de siliques de canola.

Dommages

Les dommages les plus importants attribuables aux altises sont ceux causés par les adultes qui se nourrissent des cotylédons et des premières vraies feuilles pendant les deux semaines suivant la levée, particulièrement par temps chaud et sec. Les symptômes ressemblent à de petites cavités sur les feuilles (figure 3). Les tissus autour de ces cavités nécrosent et finissent par former des trous de la taille de la tête d’une aiguille. Lors d’une forte infestation, l’apex, ou point de croissance de la plante, peut être endommagé, ce qui entraîne la mort de la plante. Une infestation qui dépasse le seuil économique entraîne également une réduction de la population de canola, des délais de croissance et de maturité ainsi qu’une diminution importante du potentiel de rendement.

Selon une étude menée au Dakota du Nord, les dommages causés par les larves qui se nourrissent des racines n’auraient pas d’impact économique; toutefois, au Manitoba, on estime que ces dommages peuvent causer une perte de rendement de 5 %1,2.

Les dommages causés par les adultes de la génération d’été après que la culture ait atteint le stade de croissance 5.1 ou 5.2 (floraison) ne nuisent ni au potentiel de rendement ni à la qualité des récoltes. Ils peuvent toutefois occasionner des pertes de rendement et de qualité dans les champs semés tardivement, mais l’impact n’a généralement pas de conséquence économique.

Dommage causé par l’alimentation d’altises adultes

Figure 3. Dommage aux cotylédons de canola causé par l’alimentation d’altises adultes.

Gestion1,2

Mesures préventives

Les mesures préventives sont des moyens qui sont pris avant l’apparition des insectes nuisibles afin d’atténuer le risque qu’ils aient un impact économique. Des traitements de semences de la famille des néonicotinoïdes ou de celle des buténolides peuvent être utilisés. Il existe également diverses méthodes culturales. Par exemple, un semis effectué aussitôt que possible permet, avec un peu de chance, d’éviter des conditions chaudes et sèches pendant les deux premières semaines suivant la levée. En outre, les plantes d’une variété vigoureuse semée tôt atteindront plus rapidement la taille où elles sont plus tolérantes aux dommages. Un semis peu profond, dans la mesure où il est effectué dans la zone humide du sol, favorisera une levée rapide. Un système de production en semis direct, jumelé à un semis hâtif, peut fournir un environnement idéal à la croissance des plantes et défavorable à l’activité des altises. Un semis plus dense peut aider à réduire l’impact des dommages à l’acre. À taux de semis égal, un espacement des rangs plus larges, de 20 à 30 cm, combiné à un espacement sur le rang de 10 cm contribue à réduire les dommages par plant. L’évaluation des populations d’altises à l’automne dans les champs qui seront affectés à la production de canola l’année suivante fournit une indication du risque de dommages au cours de la prochaine saison

Mesures réactives

Les pièges jaunes collants de 10 cm sur 15 cm peuvent servir à détecter la présence d’altises, mais non pas à déterminer si le seuil d’intervention est atteint. S’il y a des altises sur les pièges jaunes collants ou si des infestations d’altises ont été fréquentes au cours des dernières années, effectuez un dépistage quotidien pendant les deux semaines suivant la levée ou jusqu’au stade quatre feuilles. L’évaluation des dommages devrait être effectuée par temps ensoleillé, chaud et calme puisque ces conditions sont favorables à l’activité des altises.

La gravité des dommages est le facteur déterminant pour décider si un traitement insecticide devrait être effectué. Échantillonnez d’abord les bordures de champs près des zones herbeuses ou forestières puisque les altises se déplacent de ces zones de diapause vers le champ pour se nourrir. Arrêtez-vous à plusieurs endroits dans le champ et estimez la gravité des dommages sur plusieurs plantes à chaque endroit. Le seuil économique d’intervention est atteint lorsque 25 % de la surface des cotylédons ou des feuilles est endommagée (figure 4) et que des altises sont présentes.

10% flea beetle injury 25% flea beetle injury 60% flea beetle injury

Figure 4. Pourcentage de la surface des cotylédons qui est endommagée par des altises, de gauche à droite : 10 %, 25 % (seuil économique), 60 %.

Si moins de 25 % de la surface des feuilles est endommagée et que les plantes sont en croissance active, la culture peut généralement se rétablir (figure 5). Les dommages peuvent empirer rapidement par temps chaud et sec, il est donc essentiel d’effectuer un dépistage quotidien, de préférence en après-midi. Lorsque le seuil est atteint, un traitement insecticide foliaire devrait être effectué sans délai pour prévenir des pertes économiques. Une fois que la culture a atteint le stade de quatre feuilles, les nouveaux dommages causés par les altises n’occasionnent généralement pas de pertes de rendement; toutefois, si les altises endommagent l’apex, une perte de rendement est possible. Les années où les altises sont abondantes et où les conditions météorologiques sont favorables à leur développement, des pertes de rendements sont possibles même si la semence était traitée avec un insecticide. Dans de tels cas, un traitement insecticide peut être nécessaire trois semaines après le semis pour protéger la culture d’une nouvelle infestation1.

Représentation graphique montrant une perte de 50 % et 25 % de la surface des cotylédons

Figure 5. Représentation graphique montrant une perte de 50 % et 25 % de la surface des cotylédons. Si l’hypocotyle (la tige) est compromis, la perte est totale. Source : Conseil canadien du canola.

Les producteurs devraient consulter leur fournisseur de pesticides pour se renseigner sur les traitements de semences et les insecticides foliaires.