Mauvaises herbes habituelles dont les producteurs doivent tenir compte dans leurs décisions de gestion

La gestion efficace des mauvaises herbes nécessite une approche intégrée. Le stade de développement des mauvaises herbes et les conditions météorologiques influent sur l’efficacité des herbicides. La résistance aux herbicides est de plus en plus répandue, ce qui exige l’adoption de stratégies de désherbage plus poussées. Le présent document décrit certaines des mauvaises herbes les plus répandues en Ontario et au Québec et dont les producteurs doivent tenir compte dans leurs décisions de gestion.

  • Abutilon
  • Amaranthe tuberculée
  • Amarante : de Powell, a racine rouge, hybride
  • Chénopode blanc
  • Grande herbe à poux
  • Petite herbe à poux
  • Sétaires : géante, verte et glauque
  • Vergerette du Canada

Nom usuel : Abutilon
Nom scientifique : Abutilon theophrasti
Cycle végétatif : Annuelle d’été

Plantule d’abutilon
Figure 1. Plantule d’abutilon.
Plant d’abutilon
Figure 2. Plant d’abutilon.
Fleur d’abutilon
Figure 3. Fleur d’abutilon. Crédit photo : Steve Dewey, Utah State University, Bugwood.org.
Fruit d’abutilon en forme de coupe
Figure 4. Fruit d’abutilon en forme de coupe. Crédit photo : Charles T. Bryson, USDA Agricultural Research Service, Bugwood.org
Graines d’abutilon
Figure 5. Graines d’abutilon. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org

Identification :L’abutilon est une mauvaise herbe importante au Québec et en Ontario. L’abutilon est une annuelle d’été érigée, facilement identifiable par ses feuilles en forme de cœur recouvertes d’abondants poils courts et doux qui les rendent velouteuses au toucher. Elle est très compétitive dans les cultures en ligne et possède des propriétés allélopathiques. Les plantules portent deux cotylédons – un cordé et un presque rond – couverts de poils courts sur les deux faces (Figure 1). Les plantules d’abutilon peuvent être confondues avec celles de la sida épineuse (Sida spinosa) qui apparaissent au même moment et possèdent deux cotylédons en forme de cœur et une première vraie feuille plus dentelée que l’abutilon. Les feuilles subséquentes de l’abutilon sont cordées à bords ronds et dentés, mesurent de 7,5 à 20 cm de long et de large et sont terminées en pointes disposées en alternance sur la tige (Figure 2). Les tiges, généralement non ramifiées, peuvent atteindre plus de 2 m de haut et sont également couvertes de poils doux. Les feuilles et les tiges dégagent une odeur désagréable lorsqu’on les écrase.

Les fleurs de l’abutilon sont constituées de cinq pétales jaune-orange qui se forment sur de courts pédoncules à l’aisselle des feuilles supérieures (Figure 3). Les fruits sont des capsules vertes en forme de coupe qui tournent au brun foncé à maturité (Figure 4). Les graines sont réniformes, couvertes de poils et de couleur brun grisâtre (Figure 5). Un plant d’abutilon peut produire jusqu’à 9 000 graines dont la dureté du tégument et la capacité à émerger, même enfouies à 5 cm de profondeur, expliquent la persistance et la longévité de la mauvaise herbe dans le réservoir de semences du sol.

Gestion : Il est recommandé de s’attaquer aux peuplements existants d’abutilon avant de semer. Les herbicides de prélevée sont efficaces et permettent à la culture d’acquérir un avantage concurrentiel. Le travail du sol peut également aider à prévenir l’émergence de la mauvaise herbe. Des herbicides résiduels efficaces appliqués au sol peuvent être inclus dans les traitements non sélectifs de présemis. Les applications d’herbicides de postlevée après un traitement appliqué au sol sont généralement les meilleurs pour combattre cette mauvaise herbe. La taille de l’abutilon peut avoir un impact sur l’efficacité des traitements de postlevée. De plus, l’abutilon peut être difficile à maîtriser quand les herbicides sont appliqués entre la fin de la soirée et le début de la matinée. En effet, pendant cette période, les feuilles de la plante retombent presque à la verticale, ce qui permet plus difficilement d’obtenir une bonne couverture par la pulvérisation. Les stress environnementaux peuvent également entraîner l’affaissement des feuilles.

Nom usuel: Waterhemp
Nom scientifique: Amaranthus rudis
Cycle végétatif: Annuelle d’été

Plantule d’amarante tuberculée
Figure 6. Plantule d’amarante tuberculée. Crédit photo : Steven Gower.
Jeunes plants d’amarante tuberculée
Figure 7. Jeunes plants d’amarante tuberculée.
Amarante tuberculée avec ses tiges rouges et ses feuilles vertes
Figure 8. Amarante tuberculée avec ses tiges rouges et ses feuilles vertes. À remarquer la forme lancéolée des feuilles et le pétiole plus court que la feuille. Crédit photo : Steven Gower.
Inflorescence d’amarante tuberculée
Figure 9. Inflorescence d’amarante tuberculée. Crédit photo : Steven Gower.

Identification: L’amarante tuberculée appartient à la famille des amarantes (ou amaranthes) qui comprend plusieurs espèces nuisibles, dont l’amarante à racine rouge et l’amarante hybride. Il est difficile de distinguer les différentes espèces d’amarante les unes des autres, surtout au stade de plantule. Il existe pourtant quelques différences essentielles. Les plantules de l’amarante tuberculée sont glabres et leurs feuilles ont un aspect cireux ou lustré. Les cotylédons de l’amarante tuberculée sont souvent plutôt ovoïdes, contrairement aux cotylédons longs et linéaires des autres espèces d’amarante (Figure 6). Les premières vraies feuilles de l’amarante tuberculée sont généralement plus longues et lancéolées que celles des autres amarantes (Figures 7 et 8). Les tiges de l’amarante tuberculée sont glabres alors que les tiges des autres amarantes sont velues1. L’amarante tuberculée atteint généralement 1,2 à 1,5 m de haut, mais peut croître jusqu’à 3 m. L’inflorescence est composée de nombreuses petites fleurs vertes (Figure 9). Bien que l’inflorescence terminale puisse mesurer jusqu’à 30 cm de long, de nombreuses branches latérales sont présentes sur toute sa longueur. Les fleurs mâles et femelles se trouvent sur des individus distincts. Certaines populations peuvent prendre une couleur rouge rosâtre à maturité (la plupart sont vertes). L’amarante de Palmer est une autre espèce qui ressemble à l’amarante tuberculée. Les deux se distinguent par leur tige glabre. Le principal élément qui permet de différencier l’amarante de Palmer des autres amarantes est le pétiole. L’amarante de Palmer possède un long pétiole par rapport à la longueur de la feuille, alors que le pétiole de l’amarante tuberculée (et des autres amarantes) est plus court que le limbe.

Chez l’amarante tuberculée, l’émergence a lieu en continu et se poursuit jusque tard dans la saison. Il s’agit d’une espèce prolifique pouvant produire 300 000 graines ou plus par plant2. Les graines sont petites mais peuvent survivre dans le sol pendant plusieurs années. En raison du patron d’émergence prolongé et de l’abondante production de graines, il peut être nécessaire de procéder à plusieurs traitements herbicides. Les pratiques de production qui améliorent la compétitivité de la culture et perturbent la production de graines de l’amarante tuberculée sont des outils de désherbage extrêmement précieux.

L’amarante tuberculée croît à un rythme relativement plus élevé que la plupart des mauvaises herbes et des cultures, soit à plus de 2,5 cm par jour pendant la saison3. La concurrence de l’amarante tuberculée a entraîné une réduction de 44 % du rendement dans le soya cultivé en rangs de 30 pouces (et de 37 % dans le soya cultivé en rangs de 7,5 pouces4. Le rendement du maïs a reculé de 15 %. Toutefois, retarder l’émergence des mauvaises herbes après le stade V5 a permis de limiter la perte de rendement à seulement 10 % dans le soya et 1 % dans le maïs dans les situations où l’amarante tuberculée a été maîtrisée avant d’atteindre 15 cm de hauteur4.

À surveiller : On retrouve des populations d’amarante tuberculée résistantes aux herbicides dans de nombreux comtés de l’Ontario et du Québec, certaines populations étant résistantes à quatre modes d’action herbicides. En Ontario, des populations résistantes aux produits des groupes 2 (inhibiteurs de l’ALS), 5 (triazines), 9 (glyphosate) et 14 (inhibiteurs de la PPO) ont été confirmées5. La résistance à un herbicide du groupe 27 (inhibiteurs de l’HPPD) a été identifiée au Québec en 2020, une résistance aux produits des groupes 2, 5 et 9 ayant aussi été observée dans la même parcelle6. L’abondance de populations d’amarante tuberculée résistantes à divers herbicides nous oblige à intégrer de multiples pratiques de gestion pour optimiser la maîtrise de cette mauvaise herbe.

Gestion: Un traitement herbicide en prélevée aide à réduire la concurrence des mauvaises herbes en début de saison et ajoute des modes d’action à la stratégie de désherbage. Plusieurs herbicides aux modes d’action différents peuvent être utilisés dans le soya et dans le maïs. Les applications séquentielles d’herbicides ayant des modes d’action différents et les mélanges en réservoir sont les meilleures options pour lutter contre l’amarante tuberculée. Pour maximiser l’efficacité des herbicides de prélevée appliqués au sol, choisissez les produits correspondants au spectre des mauvaises herbes présentes dans chaque champ et appliquez les doses maximales homologuées. Visitez régulièrement les champs pour déterminer le moment propice pour un traitement de postlevée et pour identifier les plants d’amarante tuberculée qui ont échappé au traitement précédent ou qui sont apparus plus tard.

Comme l’amarante tuberculée émerge continuellement durant la saison de croissance, il est normalement nécessaire d’appliquer des herbicides de postlevée, même après l’utilisation de traitements de prélevée. L’amarante tuberculée doit être traitée pendant qu’elle est en pleine croissance et qu’elle ne dépasse pas 10 cm de hauteur. Une couverture complète de la pulvérisation est essentielle, en particulier si un mélange en réservoir avec le glyphosate est utilisé.

Dans beaucoup de cas, la résistance aux produits du groupe 5 concerne spécifiquement l’atrazine, bien qu’il existe aussi des populations résistantes à la métribuzine. Le dépistage après le traitement herbicide est également important. Après les applications en postlevée d’herbicides du groupe 14, les plants résistants semblent gravement endommagés pendant 14 jours, mais commencent ensuite à repousser à partir des bourgeons axillaires (Figure 10)7.

Repousse d’amarante tuberculée après une application d’un herbicide inhibiteur de la PPO
Figure 10. Repousse d’amarante tuberculée après une application d’un herbicide inhibiteur de la PPO. Crédit photo : L. Benoit, University of Guelph.

Nom usuel: Amarante à racine rouge
Nom scientifique: Amaranthus retroflexus
Cycle végétatif: Annuelle d’été

Plantule d’amarante à racine rouge.
Figure 11. Plantule d’amarante à racine rouge. Crédit photo : Steven Gower.
Feuilles d’amarante à racine rouge.
Figure 12. Feuilles d’amarante à racine rouge. Crédit photo : Steven Gower.
Tige d’amarante à racine rouge
Figure 13. Tige d’amarante à racine rouge. Crédit photo : Steven Gower.
Tige porte-graines d’amarante à racine rouge
Figure 14. Tige porte-graines d’amarante à racine rouge. Crédit photo : Steven Gower.

Identification: L’amarante à racine rouge est une annuelle d’été qui produit beaucoup de graines et que l’on trouve partout en Ontario et au Québec. Il est important de savoir qu’il existe beaucoup de variations physiques entre les espèces d’amarante et que des croisements peuvent se produire et engendrer des hybrides. L’amarante à racine rouge peut être difficile à distinguer des autres amarantes, mais il est important de pouvoir l’identifier pour la combattre. Les cotylédons sont de forme allongée, ils portent une nervure centrale bien visible et leur face inférieure est teintée de rouge (Figure 11). Les feuilles, alternes et ovoïdes, sont échancrées au sommet (Figure 12); elles sont rugueuses et couvertes de poils sur la face inférieure, plus particulièrement sur les nervures. Au fur et à mesure que les plantules gagnent en maturité, la tige devient rugueuse et très velue (Figure 13). Les tiges atteignent jusqu’à 2 m de hauteur et sont vert pâle à rougeâtres, sauf à la base qui est rouge. De petites fleurs verdâtres poussent en grappes terminales et axillaires denses (Figure 14). Les grappes sont des épis épais et piquants pouvant atteindre 20 cm de long. Les fleurs sont accompagnées de bractées environ deux fois plus longues que les sépales et produisent de petites graines rondes, lustrées et noires. Un seul grand plant mature d’amarante à racine rouge peut produire 200 000 graines, voire beaucoup plus.

Espèces semblables: L’amarante à racine rouge peut être confondue avec l’amarante hybride (Amaranthus hybridus), qui se distingue par ses feuilles glabres, par la présence de quelques poils sur la partie supérieure de sa tige et par ses tiges porte-graines plus étroites, moins denses et moins piquantes (Figures 15 et 16). Les tiges florales de l’amarante hybride sont plus courtes que celles de toutes les autres amarantes. L’amarante de Powell est une autre espèce semblable à l’amarante à racine rouge et que l’on combat de la même façon que cette dernière.

Feuille d’amarante hybride
Figure 15. Feuille d’amarante hybride. Crédit photo : Steven Gower.
Tige porte-graines d’amarante hybride
Figure 16. Tige porte-graines d’amarante hybride. Crédit photo : Steven Gower.

Gestion: La variabilité génétique et le potentiel d’hybridation avec d’autres Amaranthus nuisibles contribuent à la capacité de l’amarante à s’adapter à différents environnements, climats, systèmes culturaux et stratégies de lutte. Des populations d’amarante résistantes aux herbicides sont présentes en Ontario et au Québec, la résistance aux produits du groupe 2 (inhibiteurs de l’ALS) et du groupe 5 (triazines) étant particulièrement répandue. En Ontario, on a découvert des populations d’amarante hybride et d’amarante à racine rouge résistantes aux herbicides du groupe 6 (nitriles). Des plants d’amarante de Powell et d’amarante à racine rouge résistants à la fois aux herbicides des groupes 2 et 5 ont également été observés en Ontario1. Par conséquent, les producteurs aux prises avec diverses amarantes devraient varier les modes d’action herbicides utilisés dans les mélanges en réservoir et d’une saison à l’autre. En évitant d’utiliser le même mode d’action herbicide deux années de suite, on peut réduire les risques d’acquisition d’une résistance.

Nom usuel: Chénopode blanc
Nom scientifique: Chenopodium album
Cycle végétatif: Annuelle d’été

Plantule de chénopode blanc.
Figure 17. Plantule de chénopode blanc. Crédit photo : Steven Gower.
Plant de chénopode blanc.
Figure 18. Plant de chénopode blanc. Crédit photo : Steven Gower.
Tige porte-graines de chénopode blanc
Figure 19. Tige porte-graines de chénopode blanc. Crédit photo : Steven Gower.

Identification: Le chénopode blanc – chénopode signifie patte d’oie – est une mauvaise herbe annuelle. Comme beaucoup d’annuelles à petites graines, le chénopode blanc germe à la surface ou près de la surface du sol, la profondeur optimale pour la germination des graines étant d’environ 2,5 mm. Au départ, les feuilles sont opposées, puis alternes, et peuvent être violacées sur la face inférieure, les deux faces étant recouvertes de granules blancs ou d’une substance farineuse (Figure 17). Les plantes plus matures ont des feuilles largement triangulaires aux marges irrégulières et légèrement dentées (Figure 18). Les tiges sont glabres et striées de bandes verticales vertes ou rougeâtres. À maturité, les plants atteignent généralement une hauteur de 60 cm à 1,80 m. Un plant moyen de chénopode blanc peut produire plus de 70 000 graines (Figure 19). Les graines de chénopode blanc comptent parmi les plus persistantes du réservoir de semences du sol. En moyenne, il faut 12 ans pour réduire de 50 % la quantité de graines de chénopode blanc dans le réservoir de semences du sol et 78 ans pour l’épuiser à 99 % 1.

Gestion: En Ontario et au Québec, le chénopode blanc a acquis une résistance à deux modes d’action herbicides différents, soit celui du groupe 5 (triazines) et celui du groupe 2 (inhibiteurs de l’ALS)2. Les programmes de désherbage les plus efficaces contre le chénopode blanc comportent des traitements herbicides de prélevée et de postlevée et, surtout dans le soya, deux modes d’action herbicides ou plus. Les éléments suivants sont particulièrement importants :

  • Maîtrise des mauvaises herbes déjà levées avant le semis par un travail du sol ou la destruction chimique.
  • Application d’herbicides de prélevée actifs contre le chénopode blanc.
  • Application d’herbicides de postlevée avant que le chénopode blanc ne dépasse la hauteur recommandée, soit habituellement de 10 à 15 cm.
  • Maîtrise des échappées de traitement ou des plants qui lèvent après le premier traitement de postlevée à l’aide d’une deuxième application en postlevée. Comme la petite herbe à poux, le chénopode blanc est beaucoup plus facile à détruire dans le maïs et les petites céréales que dans le soya1.

Nom usuel: Grande herbe à poux
Nom scientifique: Ambrosia trifida
Cycle végétatif: Annuelle d’été

La grande herbe à poux peut atteindre 5 m de hauteur et peut nuire considérablement au potentiel de rendement
Figure 20. La grande herbe à poux peut atteindre 5 m de hauteur et peut nuire considérablement au potentiel de rendement. Crédit photo : Steven Gower.
Plantule de grande herbe à poux
Figure 21. Plantule de grande herbe à poux. Crédit photo : Steven Gower.
Jeune plant de grande herbe à poux
Figure 22. Jeune plant de grande herbe à poux. Crédit photo : Steven Gower.
Inflorescence de grande herbe à poux
Figure 23. Inflorescence de grande herbe à poux. Crédit photo : Steven Gower.
La graine de grande herbe à poux présente 5 épines disposées autour d’une longue pointe, ce qui lui donne l’aspect d’une couronne
Figure 24. La graine de grande herbe à poux présente 5 épines disposées autour d’une longue pointe, ce qui lui donne l’aspect d’une couronne. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.

Identification: La grande herbe à poux peut créer des problèmes pour les cultures en ligne. Les plants peuvent dépasser 5 m de hauteur et entraîner une réduction significative du rendement (Figure 20). Les plantules sont reconnaissables à leurs très gros cotylédons (Figure 21). À maturité, les feuilles sont grandes, simples, profondément divisées en trois à cinq lobes et opposées (Figure 22). La grande herbe à poux apparaît généralement au début de la saison de croissance, bien que, chez certaines populations, la période de germination se prolonge jusqu’au début de l’été. Les patrons d’émergence peuvent varier d’un champ à l’autre et d’une région à l’autre en fonction des pratiques culturales antérieures. Les plants de grande herbe à poux sont souvent de 30 cm à 1,5 m plus grands que la culture et peuvent fleurir de juillet à octobre. Les fleurs de la grande herbe à poux sont généralement discrètes et se trouvent sur les branches terminales (Figure 23). Elles produisent de grandes quantités de pollen. La grande herbe à poux donne de grosses graines en forme de couronne surmontée de crêtes (Figure 24).

Gestion: Les producteurs devraient évaluer l’efficacité des traitements herbicides précédents, faire du dépistage et analyser les patrons d’émergence pour déterminer les meilleures pratiques de gestion. La grande herbe à poux a un avantage concurrentiel sur les autres mauvaises herbes et les cultures parce qu’elle apparaît tôt dans la saison, croît rapidement, présente une grande surface foliaire et peut germer sur une longue période. Sa période d’émergence prolongée peut permettre à certains biotypes d’échapper aux herbicides de prélevée appliqués au sol. Les pratiques culturales qui favorisent un couvert végétal uniforme peuvent aider à retarder la croissance de l’herbe à poux et d’autres espèces qui germent sur une longue période. Le travail du sol peut aider à maîtriser les plantules de grande herbe à poux déjà levées, mais risque aussi stimuler la germination. À long terme, la pratique du semis direct ainsi que l’utilisation appropriée des herbicides peuvent aider à réduire les populations de grande herbe à poux.

En Ontario, on a confirmé la présence de populations de grande herbe à poux résistantes aux herbicides du groupe 2 (inhibiteurs de l’ALS) et du groupe 9 (glyphosate), certaines populations ayant même acquis une résistance aux deux modes d’action1. Pour combattre la grande herbe à poux, commencez par maîtriser toutes les mauvaises herbes levées avant le semis, soit par un bon travail du sol, soit par une destruction chimique efficace. Un herbicide à effet résiduel appliqué en combinaison avec un traitement non sélectif ou dans un lit de semence propre peut aider à retarder la croissance des plants de grande herbe à poux qui apparaissent plus tardivement. Dans le cas d’une forte infestation de grande herbe à poux, plusieurs applications de postlevée seront probablement nécessaires, surtout contre les populations qui présentent une longue période d’émergence. Le choix des traitements de postlevée peut être restreint contre les populations résistantes aux inhibiteurs de l’ALS et au glyphosate. Le succès du désherbage repose sur le moment de l’intervention. Il est recommandé d’utiliser de multiples modes d’action herbicides efficaces pour aider à éviter l’apparition de nouvelles résistances.

Nom usuel: Petite herbe à poux
Nom scientifique Ambrosia artemisiifolia
Cycle végétatif: Annuelle d’été

Young common ragweed plant.
Figure 25. Jeune plant de petite herbe à poux.
Tige porte-graines de petite herbe à poux
Figure 26. Tige porte-graines de petite herbe à poux. Crédit photo : Steve Dewey, Utah State University, Bugwood.org
Graines de petite herbe à poux
Figure 27. Graines de petite herbe à poux. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.

Identification: La petite herbe à poux, originaire des États-Unis et du Canada, est une mauvaise herbe commune dans les milieux agricoles. Dotée d’un système racinaire peu profond et fibreux, elle peut atteindre une taille de 0,6 à 1,2 m. Les feuilles sont dentelées, finement divisées et, en général, légèrement pubescentes (Figure 25). Les graines sont des akènes surmontés de plusieurs pointes et ressemblent à une couronne (Figures 26 et 27).

À surveiller: La germination synchrone en début de saison est caractéristique de la petite herbe à poux dans les sites non cultivés. Les pratiques de gestion qui favorisent un couvert uniforme peuvent aider à retarder la croissance de cette mauvaise herbe.

Gestion: Des populations de petite herbe à poux résistantes aux produits du groupe 2 (inhibiteurs de l’ALS) ont été confirmées en Ontario et au Québec. L’Ontario compte également des populations résistantes aux herbicides des groupes 5 (triazines) et 9 (glyphosate), certaines ayant même acquis une multirésistance à ces deux groupes1. Une stratégie de lutte complète de désherbage devrait inclure un dépistage pour identifier les interventions mécaniques et chimiques nécessaires en présemis pour maîtriser la petite herbe à poux. Détruisez toutes les plantules de petite herbe à poux au moyen d’un travail du sol ou d’une destruction chimique avant le semis. Pour optimiser les résultats, appliquez les herbicides lorsque la petite herbe à poux a moins de 10 à 15 cm de hauteur. Tout bon programme de lutte doit comprendre des traitements de prélevée et de postlevée comportant au moins deux modes d’action efficaces.

Nom usuel: Sétaire géante
Nom scientifique: Setaria faberi
Cycle végétatif: Annuelle

Face supérieure d’une feuille et tige porte-graines de sétaire géante
Figure 28. Face supérieure d’une feuille et tige porte-graines de sétaire géante. Crédit photo : John D. Byrd, Mississippi State University, Bugwood.org
Les graines de sétaire géante germent après celles du chénopode blanc et de l’herbe à poux
Figure 29. Les graines de sétaire géante germent après celles du chénopode blanc et de l’herbe à poux. La germination se déroule sur une longue période. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org

Identification: La sétaire géante est une annuelle d’été qui nuit à la production dans l’Est du Canada. Elle présente une tige ronde, une ligule velue et une tige porte-graines duveteuse et arquée caractéristique (Figure 28). La sétaire glauque et la sétaire verte ressemblent beaucoup à la sétaire géante par leurs caractéristiques générales (ligule, type de croissance, habitat et caractéristiques de reproduction). La sétaire géante est la plus grande des trois espèces. La face supérieure du limbe et les bords de la gaine des plantules et des plants à maturité sont hérissés de nombreux poils courts.

La germination de la sétaire géante débute au printemps. La période d’émergence de la mauvaise herbe est longue et ses graines peuvent germer dans les sols peu profonds (Figure 29).

Gestion: Les sétaires ont développé une résistance aux herbicides en Ontario. La sétaire géante et la sétaire verte ont acquis une résistance aux produits du groupe 2 (inhibiteurs de l’ALS). La sétaire glauque a acquis une résistance aux produits du groupe 5 (triazines)1. L’utilisation de pratiques culturales en plus de la lutte chimique diversifie les mesures de lutte et réduit le risque de développement d’une résistance aux herbicides.

Pour combattre la sétaire géante, commencez par un travail du sol ou une destruction chimique. Appliquez les herbicides de postlevée tôt, lorsque les plants sont jeunes (10 cm ou moins). Utiliser de multiples modes d’action dans les traitements herbicides de prélevée et de postlevée contribue à retarder l’apparition de la résistance.

Espèces semblables: La sétaire verte (Setaria viridis) et la sétaire glauque (Setaria pumila) présentent des caractéristiques semblables à celles de la sétaire géante. Ce sont toutes des annuelles d’été qui produisent la même tige porte-graines duveteuse caractéristique des sétaires. Elles présentent toutes un port dressé et une ligule formée d’une rangée de poils. Bien qu’il puisse être difficile de distinguer les différentes espèces de sétaires, chacune possède des caractéristiques uniques qui facilitent l’identification.

La sétaire verte et la sétaire glauque présentent toutes deux un limbe plus étroit que la sétaire géante. La face supérieure des feuilles de la sétaire verte est entièrement lisse (Figure 30), alors que celle de la sétaire glauque est parée de longs poils épars et proéminents près du collet seulement (Figure 31). Les gaines de la sétaire glauque sont plates et marquées d’une teinte rouge-violet à la base. Chez la sétaire verte et la sétaire géante, les gaines sont rondes. Les gaines de la sétaire verte sont garnies de petits poils, tandis que celles de la sétaire géante sont lisses.

Au nombre des caractéristiques les plus distinctives figurent la couleur et la taille des tiges porte-graines. La tige porte-graines de la sétaire verte est verte ou teintée de violet et n’est pas arquée comme celle la sétaire géante (Figure 32). Les tiges porte-graines de la sétaire glauque deviennent brun jaunâtre à maturité et sont plus compactes que celles de ses deux complices (Figure 33).

Les feuilles de la sétaire verte sont glabres, rugueuses et mesurent jusqu’à 30 cm de longueur
Figure 30. Les feuilles de la sétaire verte sont glabres, rugueuses et mesurent jusqu’à 30 cm de longueur. Ses gaines sont généralement glabres, sauf pour la présence de courts poils sur les bords. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.
Les feuilles de la sétaire glauque sont glabres
Figure 31. Les feuilles de la sétaire glauque sont glabres, sauf pour la présence de longs poils laineux sur leur face supérieure, près du collet. Crédit photo : Steven Gower.
Tige porte-graines de sétaire verte
Figure 32. Tige porte-graines de sétaire verte. Crédit photo : Howard F. Schwartz, Colorado State University, Bugwood.org.
Yellow foxtail seedhead.
Figure 33. Tige porte-graines de sétaire glauque. Crédit photo : Steven Gower.

Nom usuel: Vergerette du Canada
Nom scientifique: Conyza canadensis
Cycle végétatif: Annuelle/annuelle hivernante

Plantules de vergerette du Canada
Figure 34. Plantules de vergerette du Canada. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.
Tige centrale dressée de la vergerette du Canada
Figure 35. Tige centrale dressée de la vergerette du Canada.
Inflorescence en capitules de la vergerette du Canada
Figure 36. Inflorescence en capitules de la vergerette du Canada. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.
Graine de la vergerette du Canada portant une aigrette qui favorise la dissémination par le vent
Figure 37. Graine de la vergerette du Canada portant une aigrette qui favorise la dissémination par le vent. Crédit photo : Bruce Ackley, The Ohio State University, Bugwood.org.

Identification: La vergerette du Canada émerge à l’automne et au printemps. Les plantules se développent sous forme de rosette basale (Figure 34). Les plants qui apparaissent à l’automne survivent à l’hiver sous forme de rosette basale dont la tige centrale s’allonge au printemps. Les feuilles de la vergerette du Canada sont alternes, linéaires et simples, à bords entièrement ou légèrement dentés (Figure 35). Les feuilles rapetissent progressivement vers la cime du plant. À la maturité du plant, les feuilles n’ont pas de pétiole. La tige principale s’allonge, donnant à la plante l’apparence d’une queue de cheval. Les fleurs sont disposées en capitules comptant de nombreuses fleurs à rayons blancs (Figure 36). Les fruits sont de petits akènes jaunes, chacun portant une aigrette blanche qui aide à la dissémination par le vent (Figure 37). Les graines de la vergerette du Canada germent habituellement à l’automne ou au printemps, mais cela peut aussi se produire au milieu de l’été, lorsque les conditions de croissance sont propices. La plante peut atteindre jusqu’à 2 m de hauteur. Une fois qu’elle a atteint 12,5 cm, la mauvaise herbe devient difficile à maîtriser seulement avec des herbicides.

À surveiller: La prévalence de la vergerette du Canada a augmenté et des biotypes résistants aux herbicides sont apparus en raison de trois facteurs principaux : le recours au travail réduit et au semis direct, les rotations de cultures peu diversifiées (production de soya dans le même champ pendant plusieurs années consécutives) et le choix limité d’herbicides. La vergerette du Canada multirésistante (aux inhibiteurs de l’ALS et au glyphosate) est courante dans les cultures de l’Ontario1,2. Une production abondante de graines et la dispersion par le vent facilitent la propagation des biotypes de vergerette du Canada résistants aux herbicides.

Gestion: Plusieurs facteurs peuvent influencer la lutte contre la vergerette du Canada. La taille et le stade de développement de la mauvaise herbe au moment de l’application de l’herbicide peuvent avoir un effet déterminant sur l’efficacité du traitement. La vergerette du Canada est plus facile à maîtriser tant qu’elle est petite, au stade de la rosette, et qu’elle mesure moins de 10 à 15 cm. Après la montaison, il devient plus difficile de la combattre. Le deuxième facteur est que l’émergence de la vergerette du Canada a lieu sur une longue période, ce qui peut compliquer le calendrier des traitements non sélectifs. Dans bien des cas, inclure un herbicide à activité résiduelle peut aider à maîtriser les plants à émergence tardive. Le troisième facteur qui nuit à la lutte contre la vergerette du Canada est le nombre limité d’options d’herbicides de postlevée, en particulier pour le soya. En raison de cette limitation, il est important d’utiliser efficacement des herbicides non sélectifs, de présemis et de prélevée.  

Il existe des options d’herbicides pour la destruction chimique à l’automne ou au printemps ainsi que pour les applications de prélevée et de postlevée contre la vergerette du Canada. Les herbicides de prélevée à activité résiduelle devraient constituer la base d’un programme de gestion de la vergerette du Canada. La sensibilité de la vergerette du Canada aux herbicides diminue considérablement après la montaison au printemps.

Conseils pour la lutte contre la vergerette du Canada :
  • Destruction chimique à l’automne ou au début du printemps pour diminuer la population ou réduire le nombre de plantules. Prévoir un traitement supplémentaire à l’approche du semis.
  • Préparer un lit de semence propre avec un traitement non sélectif au printemps, avant que les mauvaises herbes atteignent 10 cm.
  • Ajouter des herbicides à effet résiduel au traitement non sélectif du printemps.
  • Utiliser les doses maximales recommandées des herbicides pour maximiser l’activité résiduelle et l’activité en postlevée contre les plants de vergerette du Canada de diverses tailles.
  • Des traitements herbicides à multiples modes d’action devraient être utilisés contre les biotypes résistants aux inhibiteurs de l’ALS ou au glyphosate ou les biotypes multirésistants3.
  • Utiliser des herbicides de postlevée pour maîtriser les mauvaises herbes qui ont échappé aux traitements précédents.
  • Effectuer des rotations de cultures et un travail mécanique pour réduire les fortes infestations de vergerette du Canada33.
  • Consulter les étiquettes des produits pour connaître les précautions et restrictions liées à leur utilisation afin d’éviter les dommages à la culture et l’accumulation dans le sol.