Le gel printanier peut endommager les cultures levées depuis peu, mais, dans tous les cas sauf les gels les plus sévères, les dommages ne nécessiteront pas une reprise de semis pour ces trois cultures. Les risques de dommages causés par le froid aux plantules dépendent du stade de croissance, de la température de l'air, de l'humidité du sol, de la texture du sol et du système de travail du sol.
Maïs
À quelle température la culture risque-t-elle d’être endommagée?
Puisque le point végétatif du maïs demeure sous la surface du sol jusqu'au stade de croissance V5 (5 collerettes visibles) environ, il est moins susceptible d’être endommagé par le gel au début de la croissance du plant. Jusqu’à -2 °C, le gel peut endommager les tissus foliaires des plantules sans pour autant abîmer le point végétatif; en dessous de -2 °C, le point végétatif est vulnérable même s'il se trouve sous la surface du sol. Il est important d'attendre 3 à 5 jours après un gel pour évaluer avec précision les dommages causés à la culture. Dans les 24 premières heures suivant le gel, les feuilles peuvent prendre une couleur jaune, argentée ou brune, se flétrir ou se gorger d'eau (figure 1).
Figure 1. Feuilles endommagées par le gel qui semblent gorgées d’eau.
Après plusieurs jours, les feuilles peuvent mourir. La tige peut également brunir; cependant, si le point végétatif n’a pas été endommagé, la plantule peut se rétablir, surtout si de nouveaux tissus verts sont apparus dans le verticille (figure 2)1.
Figure 2. Repousse après un gel dommageable.
Un point végétatif ferme, blanc ou de couleur crème est une bonne indication que le plant est vivant et que la probabilité de récupération est très bonne. Les semis dont les points végétatifs sont mous et de couleur foncée risquent de mourir. Par temps favorable, une nouvelle feuille devrait se développer et apparaître 3 à 4 jours après le gel. Parfois, le tissu foliaire en décomposition peut empêcher la croissance de nouvelles feuilles à partir du verticille, ce qui donne au semis une apparence tordue.
Les dommages causés par le gel se traduiront-ils par une perte de rendement?
Lorsque la repousse apparaît au bout de 3 à 5 jours, il est temps d’évaluer les dommages subis par les plants. Pendant la visite du champ, repérez les signes de croissance de nouvelles feuilles à partir du verticille et disséquez des tiges pour évaluer l'état des points végétatifs. Les journées fraîches qui pourraient suivre un épisode de temps froid sont susceptibles de retarder le rétablissement de la culture et le diagnostic de l'étendue des dommages. Rappelez-vous que le facteur déterminant du rendement du maïs est le nombre de plants, donc, si le peuplement n'est pas réduit, le potentiel de rendement ne devrait pas l’être non plus. Cependant, comme l’importance des dommages causés par le gel peut varier d’un endroit à l’autre dans le champ, c’est l’uniformité de la croissance qui pourrait être compromise. Profitez de votre visite au champ pour évaluer non seulement l’état des plants, mais également la densité du peuplement à divers endroits et ainsi déterminer le nombre de plants qui devraient survivre. En comparant le potentiel de rendement estimé du peuplement existant à celui d'un nouveau peuplement, vous pourrez décider s’il est économique de reprendre le semis.
Soya
Le soya est plus sensible aux dommages causés par le gel que le maïs, car le point végétatif des dicotylédones est exposé dès l'émergence. En revanche, quand le principal point végétatif (méristème apical) est endommagé, le soya montre une plus grande capacité de récupération que le maïs. Les plants de soya peuvent produire de nouvelles pousses à partir des bourgeons auxiliaires situés à chaque nœud.
Figure 3. Cotylédons endommagés par le gel qui semblent gorgés d’eau.
Figure 4. Cotylédons endommagés par le gel et nouvelle repousse à partir des bourgeons auxiliaires.
Quelles températures sont dommageables?
Les plants de soya risquent d’être endommagés à des températures oscillant entre -2 et 0 °C. Aux stades VE (émergence) à VC (feuilles unifoliées déroulées), le soya peut tolérer jusqu'à -2,8 °C pendant de courtes périodes. La mort complète (bourgeons, tiges et feuilles) des plants sensibles ne devrait pas survenir avant que les températures ne se maintiennent à -2 °C pendant une période prolongée. Le soya au stade VC est légèrement plus tolérant au gel si on le compare aux plants à V1 (première trifoliée) et à V2 (deuxième trifoliée). Le soya dont les feuilles trifoliées sont sorties (stades de croissance V1 et V2) devient plus sensible à une période de gel, quelle qu’en soit la durée.
Mes champs de soya devront-ils être réensemencés?
Comme avec le maïs, la patience est de mise pour déterminer si un plant de soya est susceptible de survivre au gel. Attendez 3 à 5 jours avant d'évaluer le potentiel de nouvelle croissance au niveau des bourgeons auxiliaires. Réensemencer un champ de soya endommagé par le gel demande plus d'attention car le soya est plus sensible que le maïs au gel et au temps froid. Cependant, le soya est capable de tolérer une réduction de peuplement et produire un rendement semblable à celui du peuplement d'origine en raison de la capacité de compensation que possède chaque plant dans un peuplement clairsemé. Un réensemencement n'est pas recommandé à moins que la densité de peuplement soit inférieure à 297 000 plants par hectare (120 000 plants/acre). Au Canada, le soya atteint son plein potentiel de rendement avec un peuplement final de 309 000 à 370 000 plants par hectare (125 000 à 150 000 plants/acre)2. Au fur et à mesure que la saison progresse, on doit demeurer vigilant pour dépister tout problème de fonte des semis et les dommages causés par les événements climatiques dans les champs de soya, surtout ceux qui sont victimes du gel.
Canola
Le canola, comme le soya, est une dicotylédone, ce qui signifie que le point végétatif est exposé dès l'émergence. Cependant, le canola tolère mieux le froid que le soya.
Quelles températures sont dommageables?
Le canola qui a été exposé à des températures proches du point de congélation pendant plusieurs jours sera « endurci », de sorte que les plants pourront résister au gel sans subir de dommages graves. Des études menées à l'Université du Manitoba et à la Station de recherche d'Agriculture et Agroalimentaire Canada à Beaverlodge ont montré que le canola semé tôt et endurci pouvait résister à des températures de -8 à -9 °C, tandis que le canola semé plus tard et qui n'avait pas été endurci mourrait à des températures de -3 à -4 °C.
Mes champs de canola devront-ils être réensemencés3?
La patience est à nouveau recommandée avant d'évaluer l'étendue des dégâts. Après 3 à 5 jours, si le point végétatif est vert, ferme et ne semble pas pincé, le plant se rétablira. Dans des conditions de croissance fraîches et sèches, il faut jusqu'à 10 jours avant que le plant recommence à pousser. Pour évaluer la situation, marchez en diagonale à travers le champ en vous arrêtant tous les 20 pas pour compter le nombre de plants dans une section d'un pied carré (faites deux « L » avec votre pied pour obtenir une mesure approximative de la surface). Tenez compte du pourcentage de plants tués, de plants sauvés et de la population de mauvaises herbes. Un peuplement minimal de 40 plants par mètre carré (4 plants/pi2) dans l’ensemble du champ devrait produire un rendement acceptable, à condition que les mauvaises herbes soient maîtrisées. Dans tout champ dont le peuplement est clairsemé, le désherbage est crucial si on souhaite maintenir les rendements. Le canola peut compenser un peuplement plus faible, car les plants survivants profiteront de la diminution de la concurrence pour la lumière, l'humidité et les nutriments. Les plants seront plus gros et produiront plus de branches, de gousses et de graines par gousse, mais auront besoin de plus de temps pour parvenir à maturité. Cependant, ils y parviendront plus vite que si le champ entier était réensemencé. Soyez également attentif aux populations d’altises; si le temps chaud et ensoleillé est de la partie (plus de 15 °C), les altises risquent de se multiplier rapidement. Les traitements de semences devraient fournir une protection, mais si les dommages sont importants (plus de 25 % de feuilles attaquées) une application d'insecticide peut être justifiée.
1Nielsen, R.L. 2001. Frost and low temperature injury to corn and soybean. Corny News Network. Purdue University. http://www.kingcorn.org.
2Brown, C. (éditeur) 2017. Guide agronomique des grandes cultures. Publication 811F. Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario.
3Spring Frost Damage. Manitoba Agriculture. https://www.manitoba.ca/agriculture/crops/crop-management/spring-frost-damage-bulletin.html
Énoncés légaux :
Le rendement peut varier d’un endroit à l’autre et d’une année à l’autre en fonction des conditions de croissance, du sol et des conditions climatiques locales. Dans la mesure du possible, les producteurs doivent évaluer les données de plusieurs parcelles sur plusieurs années et tenir compte de l’incidence de ces conditions sur leurs champs.
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