Notions de base du compactage

Les sols (souvent les sols de texture moyenne et fine) sont sujets au compactage lorsqu’ils approchent de leur capacité de rétention en eau. La capacité de rétention en eau est le point à partir duquel les pores entourant les particules de sol sont complètement occupés par l’eau. L’eau contenue dans le sol agit comme un lubrifiant entre les agrégats du sol, leur permettant de se tasser les uns contre les autres lorsque la machinerie lourde qui circule exerce une pression sur le sol.

Dans un sol compacté, les pores de grande taille sont moins nombreux, le volume total des pores est réduit et la densité apparente est augmentée. Les racines des plantes qui poussent dans cet environnement font face à des problèmes d’aération. L’eau est retenue dans le sol au lieu de s’infiltrer dans le profil. Dans une situation de travail conventionnel, il peut arriver que la machinerie passe sur 100 % de la surface du champ au cours d’un seul cycle de production1. Le compactage du sol dégrade les terres à l’échelle mondiale et ce phénomène est attribué à l’utilisation d’une machinerie de plus en plus lourde chaque décennie depuis les années 19502,3.

Réaction du maïs

Émergence et densité de peuplement. L’augmentation de la circulation de la machinerie entraîne des retards et une variabilité dans l’émergence des plantules de maïs. Il a été démontré que les sols compactés par une pression accrue par unité de surface, comme celles exercées par les pneus des véhicules, diminue davantage la densité de peuplement du maïs que les sols non compactés. Les ornières creusées par les pneus rendent la surface du sol irrégulière, ce qui nuit au contrôle de la profondeur de semis. Les résidus des cultures de maïs précédentes peuvent aussi être à l’origine de l’émergence inégale des plantules (figure 1).

Les résidus de culture dans un système de production de maïs en continu peuvent être responsables de l’émergence inégale

Figure 1. Les résidus de culture dans un système de production de maïs en continu peuvent être responsables de l’émergence inégale. La technique du travail réduit peut permettre de préserver la structure du sol et d’éviter le compactage, mais il peut alors être préférable d’équiper les semoirs de tasse-résidus pour préparer le lit de semence.

Hauteur. Le tableau 1 montre les effets du compactage du sol sur la hauteur des plants de maïs. Le maïs est une culture de grande taille qui peut être plus sensible aux différences de hauteur causées par le compactage. Six semaines après le semis, le maïs cultivé dans les sols non compactés était 21 % plus grand que celui semé dans les sols compactés par les pneus des véhicules circulant chaque année. Les différences de hauteur étaient encore perceptibles à la récolte, et les rendements avaient tendance à diminuer chez les plants plus courts4.

Tableau 1. Effets du compactage du sol sur la hauteur du maïs six semaines après le semis et à la récolte*.

Effets du compactage du sol sur la hauteur du maïs six semaines après le semis et à la récolte

Développement des épis et potentiel de rendement

Les effets du compactage sur le développement des épis et le potentiel de rendement ne sont généralement pas uniformes d’un champ à l’autre. Les plants de maïs arrivent parfois à produire des épis plus gros lorsque le compactage entraîne une diminution de la densité de peuplement. Cependant, le maïs peut aussi réagir en produisant plus d’épis, mais de plus petite taille, lorsqu’il est cultivé sur des sols compactés par la circulation de la machinerie4. La profondeur du compactage dépend de nombreux facteurs, et le développement de plants sains est grandement influencé par les stress extrêmes de sécheresse et d’humidité.

Le potentiel de rendement est lié à la taille des épis. Une réduction de 19 à 50 % du rendement du maïs a été observée dans un sol compacté par rapport à un sol non compacté2,4,5. Un compactage important du sous-sol peut se produire après un seul passage d’une charge de 18 tonnes métriques par essieu. Un tel compactage peut nuire au rendement du maïs pendant cinq à douze ans4.

Mesures correctives

Gel-dégel par rapport à la contraction du sol. Le compactage en profondeur se corrige naturellement en partie par l’assèchement du sol pendant les mois d’été. Les sols se fissurent lorsqu’ils s’assèchent, et ce processus de contraction et de gonflement successifs permet d’atténuer le compactage des sols de type argileux. Les fissures peuvent se trouver à quelques mètres sous la surface du sol. Le gel hivernal remédie au compactage de la couche supérieure du sol. Plusieurs dizaines de cycles de gel-dégel dans des champs très humides (plus de 85 % des pores remplis d’eau) sont nécessaires pour rompre le compactage. En réalité, les sols peuvent subir deux ou trois cycles de gel-dégel par année au Canada.

Cultures de couverture. Les cultures de couverture peuvent remplacer avantageusement les instruments aratoires pour corriger le compactage. La croissance des racines des cultures de couverture corrige les sols en stabilisant les agrégats, en créant des pores pour l’infiltration et en brisant les semelles de labour. Les cultures de couverture semées dans des champs aux prises avec du compactage aident à drainer les sols humides et à créer des galeries pour les racines des cultures de base. Ces actions bénéfiques pour le sol sont uniques à la croissance des cultures de couverture. Malheureusement, les outils de travail en profondeur destinés à décompacter le sol ne donnent des résultats positifs pour les cultures que dans 25 % des cas6.

Prévention du compactage

Suivez les traces. Jusqu’à 80 % du compactage du sol se produit au premier passage dans le champ7,8. Si on n’y prête pas attention, les empreintes de la machinerie peuvent couvrir la totalité du champ. En incluant les chevauchements, les passages dans un système de travail conventionnel peuvent créer un lit de semence portant des traces de roues sur 145 % de sa surface1. La création de voies de circulation contrôlées peut prendre plusieurs années. Réussir à contrôler la circulation permet d’augmenter l’efficacité des opérations sur le terrain et de réduire la puissance des machines. Considérez ce qui suit :

  • Les remorques à grain sont les pièces d’équipement les plus lourdes (transportant plus de 20 tonnes métriques) et devraient être les premiers éléments à considérer dans le contrôle des voies de circulation (figure 2)4,7.
  • Évitez de traverser les champs en diagonale.
  • Gonflez correctement les pneus pour réduire le compactage de surface. La pression des pneus pour le travail au champ devrait être limitée à environ 0,55 à 1 bar (8 à 15 psi), tandis que la pression généralement utilisée sur la route est de 2,75 bars (40 psi) environ8.
  • Éliminez des passages de travail du sol, surtout si l’intention est d’assécher les champs.
. Pour circuler sur la route, les pneus doivent généralement être gonflés à 2,75 bars (40 psi) environ

Figure 2. Pour circuler sur la route, les pneus doivent généralement être gonflés à 2,75 bars (40 psi) environ. Les travaux au champ doivent être exécutés avec des pneus gonflés à des pressions plus proches de 0,55 à 1 bar (8 à 15 psi).

Charges par essieu. La combinaison d’une charge par essieu trop lourde et de pneus trop gonflés peut créer des ornières deux fois plus compactées que les ornières faites par le même équipement réglé correctement6. Le compactage en profondeur s’étend verticalement (0,6 à 0,9 m) et horizontalement à partir des ornières. Les zones de compactage peuvent être limitées aux 15 à 25 cm supérieurs du sol lorsque les charges par essieu sont inférieures à neuf tonnes métriques4.

Résumé

Il n’est pas possible d’éviter complètement le compactage du sol, mais on peut le prévenir, le réduire et le contrôler autant que possible. Même un léger compactage de la couche arable peut entraîner jusqu’à 15 % de perte de rendement après quelques années9. Cet état devient permanent si aucun changement n’est apporté à la gestion. En diminuant le compactage de la couche arable et du sous-sol, on favorise l’infiltration et le stockage de l’eau. L’amélioration de l’environnement eau/sol permet de semer plus tôt, diminue le stress sur les racines des plants et réduit les risques liés aux maladies. Le travail du sol a pour objectif d’assécher les champs pour ces mêmes raisons, mais, en réalité, il les affaiblit et restreint leur drainage (figure 3). Les sols sont une ressource essentielle pour produire des cultures saines et rentables et doivent être préservés pour l’avenir.

Les ornières profondes témoignent d’une mauvaise infiltration de l’eau

Figure 3. Les ornières profondes témoignent d’une mauvaise infiltration de l’eau. Les systèmes racinaires des cultures de couverture et les cycles d’humidification et d’assèchement devraient, au fil des ans, contribuer à atténuer ce compactage profond.